Largement sous-diagnostiqué, le syndrome d’apnée obstructive du sommeil touche pourtant 10 à 15 % des Français. Quels sont les symptômes ? Quels sont les traitements ? Réponses avec le professeur Jean-Claude Meurice, chef du service de pneumologie du CHU de Poitiers et vice-président de la Société française de recherche et médecine du sommeil (SFRMS).
Qu’est-ce que le syndrome d’apnée obstructive du sommeil (SAOS) ?
Cette maladie, caractérisée par une obstruction au niveau de la gorge, se définit par la répétition d’au moins 5 arrêts respiratoires par heure au cours de la nuit. La respiration peut s’arrêter complètement pendant plusieurs secondes, on parle alors d’arrêt respiratoire total, ou être inférieure à 50% du débit normal, c’est l’hypopnée. Le syndrome d’apnée du sommeil est minime lorsque le nombre d’apnées et d’hypopnées est compris entre 5 et 15 par heure de sommeil. Il est modéré si ce nombre est compris entre 15 et 20 et sévère s’il est supérieur à 30.
Quelles en sont les conséquences ?
Elles sont multiples. Le réveil du cerveau des patients empêche un sommeil réparateur (fragmentation du sommeil). D’autre part, l’oxygène dans le sang chute à chaque arrêt respiratoire avant de remonter dès la reprise respiratoire. Cette succession a des conséquences sur le cerveau, le cœur et les vaisseaux et peut conduire à des complications importantes comme l’hypertension artérielle. On estime que 70% des patients sévèrement hypertendus sont porteurs d’un SAOS. On voit aussi apparaître un risque plus important d’infarctus du myocarde, d’accidents vasculaires cérébraux et de troubles du rythme cardiaque.
Quels sont les symptômes ?
Le sommeil étant de mauvaise qualité, les patients ont tendance à s’endormir facilement et rapidement dans la journée, notamment lorsqu’ils sont inactifs, sur une chaise, parfois au volant ou au travail. C’est aussi le conjoint qui alerte devant des ronflements très sonores et leur arrêt lors de pauses respiratoires nocturnes. Les patients apnéiques se lèvent également de nombreuses fois la nuit pour aller uriner et beaucoup présentent des troubles de la libido. Ces symptômes s’accompagnent également d’une surcharge pondérale pour 70 à 80% des patients.
Le SAOS est-il bien pris en charge ?
La maladie est de connaissance récente. Elle a été comprise et analysée seulement dans les années 70 et n’a pas été enseignée aux médecins avant la fin des années 90. Elle a donc été négligée pendant longtemps. On estime aujourd’hui qu’elle touche 6 à 8 % des femmes et de 10 à 15 % des hommes dont l’âge moyen se situe autour de 50 ans. Actuellement, les pneumologues, les neurologues, les ORL, qui voient les ronfleurs, et les cardiologues, par l’intermédiaire des complications, peuvent se charger du SAOS. Un peu partout en France, des centres spécialisés regroupent ces spécialités et prennent en charge les patients apnéiques. La maladie peut être confirmée par un enregistrement « simplifié » des ronflements, du flux aérien, des mouvements du thorax et de l’abdomen, ainsi que du niveau d’oxygène dans le sang, qui se fait au cours du sommeil. Des enregistrements plus complexes (polysomnographies) peuvent également être réalisés en centres de sommeil pour une analyse complète du sommeil avec une vision des cycles et stades de sommeil avec les éveils au cours de la nuit.
Quels sont les traitements proposés ?
Pour les apnées sévères, le principal traitement est de dormir avec un appareil de ventilation par pression positive continue (PPC), qui délivre un débit d’air sous pression venant pousser sur les parois de la gorge pour éviter qu’elle ne se ferme au cours de la nuit. Un masque recouvre le nez et la bouche et doit être utilisé toute la nuit. Cette thérapie est contraignante, mais efficace à 100 %. Près de 700.000 personnes sont traitées en France aujourd’hui avec ce type d’appareil.
Pour les 20 % de patients qui la refusent d’emblée et les 20 % qui l’abandonnent au cours de la première année, une orthèse d’avancée mandibulaire en résine, qui se moule sur les dents, peut être proposée en deuxième intention. Elle est à placer dans la bouche la nuit. En propulsant le maxillaire inférieur, l’objectif est d’avancer la langue et d’augmenter l’espace situé en arrière de la langue pour respirer. Elle traite efficacement 60 à 70 % des patients et a tout son intérêt lors d’une apnée du sommeil modérée.
La chirurgie de la gorge est plutôt préconisée pour les ronflements, mais reste aléatoire sur l’apnée du sommeil. Des traitements d’avenir apparaissent également comme la stimulation de la langue. Une électrode reliée comme un pacemaker va stimuler la langue pour l’avancer légèrement. Rappelons qu’il est également important de perdre du poids, car les dépôts de graisse amassés au niveau de la gorge réduisent la force des muscles et le calibre de la gorge, provoquant une apnée du sommeil.